Relocaliser l’économie et participer à la sauvegarde de la langue basque, l’euskara, toujours menacée de disparition : tels sont les deux objectifs que se sont fixés dès leur première réunion, le 15 juin 2011, les bénévoles de l’association Euskal Moneta – Monnaie locale du Pays Basque.
La dizaine de militants écologistes et de défenseurs de la langue basque présents avaient pour la plupart entendu parler pour la première fois des monnaies locales complémentaires (MLC) peu de temps auparavant, grâce à des militants de l’Abeille, la MLC de Villeneuve-sur-Lot, lors du contre-sommet de Cancon, en décembre 2010, et d’une conférence donnée à Espelette peu après.
L’association Euskal Moneta a commencé ses travaux en septembre 2011, et l’eusko a été mis en circulation après un an et demi d’un travail préparatoire intense le 31 janvier 2013 sur l’ensemble du Pays Basque nord, c’est-à-dire le Pays Basque de France, de Hendaye à Mauléon en passant par Bayonne et Saint-Palais. Au lancement, l’Eusko comptait 800 utilisateurs et 192 prestataires (commerces, entreprises et associations) dans le réseau, mais ces chiffres ont ensuite rapidement augmenté.
Ce lancement réussi a été le résultat d’un travail minutieux de préparation mené par un groupe moteur d’une douzaine de personnes qui ont réalisé un important effort d’auto-formation, de réflexion, et trois voyages d’études : rencontres nationales des MLC à Villeneuve-sur-Lot en octobre 2011, visite au Sol Violette de Toulouse en décembre 2011, puis au chiemgauer, la plus importante MLC d’Europe, en Bavière, en janvier 2012.
Pour « socialiser » le projet, Euskal Moneta a réuni dès l’automne 2011 à une première présentation une vingtaine d’associations et mouvements écologistes, sociaux et de la langue basque, représentant des milliers de membres, qui ont ensuite suivi son évolution.
Puis une vingtaine de réunions d’information ont été organisées sur tout le Pays Basque pour présenter l’avant-projet à des centaines de personnes et l’amender en fonction des retours des habitants, commerçants, chefs d’entreprises, militants associatifs, etc. C’est à la suite de ces échanges qu’a par exemple été décidé de lancer l’eusko sans fonte, car ce « taux d’intérêt négatif », malgré son fort intérêt pédagogique en termes d’éducation à d’autres façons de penser l’économie, était clairement un frein à l’appropriation du projet par les personnes que nous rencontrions.
Parallèlement, une campagne participative a été lancée pour choisir le nom de la monnaie, sur le thème : « C’est votre monnaie, à vous de choisir son nom ». Cette démarche démocratique a mobilisé un grand nombre de personnes et attiré l’attention des journalistes. Quelque 380 noms différents ont été proposés spontanément, puis un jury en a retenu sept, et les quelque 2 000 personnes participant au vote ont choisi Eusko. Eusko est un adjectif qui signifie « basque » en euskara.
Enfin, dans les derniers mois, un appel aux bonnes volontés a mobilisé une quarantaine de nouveaux bénévoles qui, organisés en commissions, ont assuré la conception et l’impression des coupons-billets de 1, 2, 5, 10 et 20 eusko, mis en place la logistique et notamment le système de distribution et de suivi sécurisé de la monnaie, préparé les outils informatiques nécessaires, les documents de communication pour les particuliers et les entreprises, la traduction pour que tous nos outils soient bilingues, le recrutement de futurs utilisateurs et prestataires, etc.
S’il a été à l’origine adopté principalement par des militants, l’eusko a en quelques mois largement dépassé ce premier cercle indispensable. Les 126 500 eusko imprimés et prévus pour tenir deux ans sont partis en trois mois, et 350 000 ont dû être réimprimés en urgence.
Aujourd’hui, plus de 500 000 eusko sont en circulation, entre plus de 3 000 adhérents particuliers, plus de 500 commerces et entreprises, et plus de 150 associations.
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